L’Observatoire a été informé par Ensemble pour le Soutien des Défenseurs des Droits Humains en Danger (ESDDH) et SOS-Torture Burundi de la confirmation de la condamnation en cassation, et de la poursuite de la détention arbitraire de Floriane Irangabiye, journaliste, chroniqueuse et animatrice sur Radio Igicaniro, un média en ligne de réfugié·es burundais·es qui diffuse des commentaires critiques et des débats sur la politique et la culture burundaises.
Le 13 février 2024, la Chambre de Cassation de la Cour Suprême du Burundi a confirmé le verdict rendu par la Cour d’appel de Bujumbura le 2 mai 2023, condamnant Floriane Irangabiye à dix ans de prison et une amende d’un million de francs burundais (environ 317 Euros) pour « atteinte à l’intégrité du territoire national » (article 611 du Code pénal burundais). Les avocats de Floriane Irangabiye ont l’intention de déposer une ultime requête en révision adressée à la Ministre de la justice et garde des sceaux qui, par la suite, pourrait instruire le Procureur général de la République à la saisine de toutes les chambres réunies au sein de la Cour suprême, sur la base des articles 160 et suivants de la loi organique n°1/21 du 3 août 2019 portant modification de la loi régissant la Cour Suprême. Au moment de la publication de cet Appel Urgent, Mme Irangabiye est toujours détenue à la prison de Bubanza.
L’Observatoire rappelle que Floriane Irangabiye a été arrêtée le 30 août 2022 à Matana, dans le Sud du Burundi, par des agents du Service national du renseignement (SNR), alors qu’elle était entrée dans le pays depuis le Rwanda où elle résidait, pour assister à des funérailles. La journaliste a été emmenée au siège du SNR à Bujumbura, où elle a subi une semaine d’interrogatoires avant d’être placée sous mandat d’arrêt le 8 septembre 2022 et d’être transférée à la prison de Mpimba à Bujumbura. Le 22 septembre 2022, Floriane Irangabiye a été transférée sans raison précise à la prison de Muyinga, à 200 kilomètres de Bujumbura où réside sa famille, où son état de santé n’a cessé de se dégrader au cours de sa détention arbitraire et où elle a été victime de menaces qui ont fait craindre pour sa sécurité.
Le 17 novembre 2022, Floriane Irangabiye a été officiellement inculpée par le Tribunal de Grande Instance de Mukaza pour « atteinte à l’intégrité du territoire national ». Il lui est notamment reproché d’effectuer fréquemment des aller-retours entre le Rwanda et le Burundi, prétendument afin de récolter des informations dans le but de déstabiliser l’ordre public, d’avoir animé une émission sur la radio Igicaniro en août 2022 incitant la population à mener un mouvement insurrectionnel similaire à celui de 2015, et d’avoir participé à diverses réunions organisées par la société civile burundaise.
Le 2 janvier 2023, le Tribunal de Grande Instance de Mukaza a condamné Floriane Irangabiye à dix ans de prison et une amende d’un million de francs burundais (environ 317 Euros) pour « atteinte à l’intégrité du territoire national », condamnation confirmée par la Cour d’appel de Mukaza le 2 mai 2023. Le 13 juin 2023, les avocats de Mme Irangabiye se sont pourvus en cassation contre cette décision.
Le 29 octobre 2023, cinq mois après la demande de ses avocats, Mme Irangabiye a été transférée à la prison centrale de Mpimba à Bujumbura, puis le lendemain à la prison de Bubanza, à 40 km au nord-ouest de Bujumbura, afin de pouvoir être suivie médicalement de manière adéquate et d'être plus proche de sa famille.
L’Observatoire dénonce la détention arbitraire et la lourde condamnation de Floriane Irangabiye, qui ne semblent viser qu’à la sanctionner pour l’exercice légitime de son droit à la liberté d’expression et pour ses prises de position en faveur des droits humains, et appelle les autorités du Burundi à la libérer immédiatement.
L’Observatoire appelle en outre les autorités burundaises à garantir le respect du droit à la liberté d’expression, tel que consacré dans plusieurs instruments internationaux de droits humains, et notamment à l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
How You Can Help
L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités burundaises en leur demandant de :
- Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et le bien-être psychologique de Floriane Irangabiye, et de l’ensemble des défenseur·es des droits humains au Burundi;
- Procéder à la libération immédiate et inconditionnelle de Floriane Irangabiye et de l’ensemble des défenseur·es des droits humains arbitrairement détenu·es au Burundi ;
- Abandonner toutes les charges à l’encontre de Floriane Irangabiye ;
- Mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris au niveau judiciaire, à l’encontre de Floriane Irangabiye et de l’ensemble des défenseur·es des droits humains au Burundi afin qu’ils et elles puissent mener leurs activités quotidiennes et de défense des droits humains librement et sans entrave, ni crainte de représailles ;
- Garantir en toutes circonstances le droit à la liberté d’expression dans le pays, tel que consacré par l’article 31 de la Constitution burundaise ainsi que par le droit international des droits humains, et en particulier par l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.