L’Observatoire a été informé de sources fiables de la détention arbitraire et du harcèlement judiciaire de M. Kaddour Chouicha, syndicaliste et président de la section d’Oran de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH).
Selon les informations reçues, le 9 décembre, M. Kaddour Chouicha a reçu un appel téléphonique de la brigade mobile de la police judiciaire du quartier Dar El Bida, à Oran, afin d’y venir récupérer son téléphone portable qui lui avait été confisqué lors de son arrestation du 24 octobre 2019 (voir rappel des faits).
Le 10 décembre 2019 au matin, M. Kaddour Chouicha s’est rendu à la brigade mobile de la police judiciaire du quartier Dar El Bida, où il a été arrêté sans mandat d’arrêt. Il a été présenté au Procureur de la République de Cité Djamel, qui l’a entendu une première fois sans la présence de ses avocats, malgré la présence de ceux-ci au tribunal depuis le matin. M. Kaddour Chouicha a été entendu une seconde fois, en présence de ces avocats. Le Procureur a décidé de juger M. Kaddour Chouicha en comparution immédiate. Ses avocats, venant d’avoir accès au dossier de leur client, n’ont eu que peu de temps pour préparer la défense. Le Tribunal de Cité Djamel a condamné M. Kaddour Chouicha à un an de prison ferme pour « atteinte à corps constitués » et « publications susceptibles de porter atteinte à l’ordre public », ainsi qu’à une amende de 10,000 Dinars (environ 75 Euros). M. Kaddour Chouicha a été incarcéré à la prison d’Oran suite à l’audience. Il peut faire appel de ce jugement.
Après le procès, le fils de M. Kaddour Chouicha, Adel, a reçu des coups de la part de policiers alors qu’il se trouvait avec une cinquantaine de personnes devant le Tribunal de Cité Djamel pour soutenir M. Kaddour Chouicha. Brièvement arrêté par la police, il a été relâché dans la soirée.
M. Kaddour Chouicha souffre de maladies chroniques, notamment de diabète et d’hypertension, et doit suivre un lourd traitement médical quotidien. L’Observatoire craint que les conditions de détention de M. Kaddour Chouicha ne lui permettent pas de suivre son traitement.
L’Observatoire rappelle que la nouvelle arrestation de M. Kaddour Chouicha intervient dans un contexte de répression généralisée des manifestants et défenseurs des droits humains en Algérie. Les manifestants du Hirak [1] subissent, depuis septembre 2019, une vague de répression et d’arrestations arbitraires sans précédent [2]. M. Said Boudour, journaliste, lanceur d’alerte et également membre de la section d’Oran de la LADDH, est placé sous mandat de dépôt depuis le 15 octobre 2019. Plusieurs membres du Rassemblement Actions Jeunesse (RAJ), dont MM. Hakim Addad, son fondateur, Abdelouahab Fersaoui, son président, Massinissa Aissous, Djalal Mokrani, Ahmed Bouider, Kamel Ouldouali, Karim Boutata, Ahcene Kadi, Wafi Tigrine et Khireddine Medjani, sont toujours détenus depuis mi-septembre et font l’objet d’accusations d’atteinte à l’unité ou l’intégrité nationales. D’autres, comme MM. Samir Belarbi, Karim Tabbou, et le journaliste Fodil Boumala, sont également toujours détenus et font face à des poursuites pour leur implication dans les manifestations pacifiques.
L’Observatoire exprime ses plus vives inquiétudes quant à la détention arbitraire et au harcèlement judiciaire de M. Kaddour Chouicha, qui ne semblent viser qu’à sanctionner ses activités pacifiques et légitimes de défense des droits humains. L’Observatoire appelle les autorités algériennes à libérer immédiatement et de façon inconditionnelle M. Kaddour Chouicha, lui octroyer un accès aux soins médicaux, ainsi qu’à cesser tout acte de harcèlement, y compris au niveau judiciaire, à son encontre et à celle de l’ensemble des défenseurs des droits humains en Algérie.
Rappel des faits :
Le 24 octobre 2019, M. Kaddour Chouicha a été arrêté par des hommes en civil lors d’un rassemblement en soutien aux détenus politiques organisé devant le Tribunal d’Oran. Emmené dans un véhicule banalisé, il a été emmené à la brigade mobile de la police judiciaire du quartier Dar El Bida, à Oran. Le 24 octobre au soir, M. Kaddour Chouicha s’est vu confisquer son téléphone et a été relâché sans qu’aucune charge ne soit retenue contre lui.
How You Can Help
L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités algériennes en leur demandant de :
i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et le bien-être psychologique de M. Kaddour Chouicha, et lui donner un accès immédiat et inconditionnel aux soins médicaux dont il a besoin ;
ii. Libérer de façon immédiate et inconditionnelle M. Kaddour Chouicha et l’ensemble des défenseurs des droits humains arbitrairement détenus en Algérie ;
iii. Mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre de M. Kaddour Chouicha ainsi que de l’ensemble des défenseurs des droits humains en Algérie ;
iv. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à ses articles 1 et 12.2 ;
v. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par l’Algérie.
Addresses
• M. Abdelkader Bensalah, Chef de l’Etat, Fax : +213 21 69 15 95
• M. Noureddine Bedoui, Premier Ministre, Fax : +213 21 28 38 37
• M. Salah Eddine Dahmoune, Ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Email : webmaster@interieur.gov.dz
• M. Belkacem Zeghmati, Ministre de la Justice, Fax : +213 21 92 17 01, E-mail : contact@mjustice.dz
• M. Boudjemâa Delmi, Ambassadeur, Représentation Permanente de la République d’Algérie aux Nations Unies à Genève, Suisse, Fax : +32 22 774 30 49, E-mail : contact@mission-algeria.ch
Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques d’Algérie dans vos pays respectifs.