L’Observatoire a été informé de sources fiables de la relaxe et de la poursuite du harcèlement judiciaire de Mme Camille Halut, membre de la section de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) [1] de Montpellier. Mme Camille Halut effectue pour le compte de la LDH des observations de manifestations afin de documenter les pratiques policières. Les rapports qu’elle a pu produire dans ce cadre ont fait état de cas d’allégations d’usage arbitraire ou excessif de la force par les policiers [2].
Selon les informations reçues, le 3 octobre 2019, le Tribunal correctionnel de Montpellier a relaxé Mme Camille Halut, qui était poursuivie, pour « entrave à la circulation » en vertu de l’article 412-1 du Code de la route, délit passible de deux ans d’emprisonnement et 4500 € d’amende. Le 1er octobre 2019, le procureur avait requis une amende de 150 euros contre l’activiste. Les poursuites faisaient suite à la conduite par cette dernière d’une mission d’observation au nom de la LDH et clairement identifiée comme telle, d’une manifestation de « Gilets Jaunes » [3] qui s’était tenue à Montpellier le 6 avril 2019, sur l’autoroute A709. Ces faits ne lui avaient été reprochés qu’à elle seule, alors qu’elle était accompagnée d’autres observateurs de la LDH et de plus de 300 manifestants. Mme Camille Halut avait été convoquée au commissariat trois semaines après la manifestation et s’était vue signifier ces poursuites au titre de violation du Code de la route.
Il ne s’agit pas du seul cas de harcèlement judiciaire visant Mme Halut pour ses activités de protection des droits humains. Le 21 septembre 2019, Mme Camille Halut a été arrêtée par des policiers membres de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) alors qu’elle effectuait une mission - à nouveau mandatée par la LDH et de façon identifiable - d’observation des pratiques policières lors de la manifestation des Gilets Jaunes qui se tenait ce jour à Montpellier. Elle a été placée en garde-à-vue pendant 23 heures au commissariat central de Montpellier pour avoir « opposé une résistance violente aux policiers » et « dissimulation de son visage » dans l’espace public en vertu des articles 433-6 [4] et R. 645-14 [5] du Code pénal, des charges pour lesquelles elle comparaîtra devant le Tribunal correctionnel le 12 décembre 2019. Au moment de son arrestation, Mme Camille Halut était en train de filmer les forces de l’ordre, de façon pacifique, à l’écart des manifestants comme des forces de l’ordre, et ne gênait pas leur action. Au total Mme Halut a passé 56 heures en garde-à-vue depuis cinq mois.
L’Observatoire rappelle qu’en vertu du droit international « chacun jouit du droit d’observer une réunion, et par là même d’en surveiller le déroulement ». Ce droit découle du droit de rechercher et de recevoir des informations, protégé par le paragraphe 2 de l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. « Surveiller le déroulement » d’une réunion signifie non seulement l’observer mais également recueillir, vérifier et utiliser immédiatement les informations disponibles pour traiter des problèmes liés aux droits de l’homme » [6].
L’Observatoire exprime sa plus vive inquiétude au regard de l’arrestation arbitraire et du harcèlement judiciaire à l’encontre de Mme Camille Halut, qui ne semblent viser qu’à sanctionner ses activités légitimes de d’observation des violations et de défense des droits humains. L’Observatoire demande aux autorités françaises de cesser immédiatement tout acte de harcèlement, y compris au niveau judiciaire, à l’encontre de Mme Camille Halut et de l’ensemble des défenseurs des droits humains.
How You Can Help
L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités françaises en leur demandant de :
i. Garantir en toute circonstances l’intégrité physique et le bien-être psychologique de Mme Camille Halut et de tous les défenseurs des droits humains en France ;
ii. Mettre fin à tout acte de harcèlement, y compris au niveau judiciaire, à l’encontre de Mme Camille Halut et de tous les défenseurs des droits humains ;
iii. Respecter en toutes circonstances la liberté d’opération des observateurs de manifestations, dans le cadre de la loi ;
iv. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement ses articles 1 et 12.2 ;
v. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits humains ratifiés par la France.
Addresses
· M. Emmanuel Macron, Président de la République, Email via http://www.elysee.fr/ecrire-au-president-de-la-republique/ ; Twitter : @EmmanuelMacron
· M. Edouard Philippe, Premier Ministre, Email via http://www.gouvernement.fr/contact/ecrire-au-premier-ministre ; Fax : + 33 1 45 44 15 72, Twitter : @EphilippePM
· M. Christophe Castaner, Ministre de l’intérieur, Twitter : @Ccastaner
· M. Jean Yves le Drian, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Twitter : @JY_LeDrian
· Mme Nicole Belloubet, Ministre de la Justice, Fax : +33 1 44 77 60 00, Twitter : @NbelloubetM.
Jacques TOUBON, Défenseur des droits, Email : communication@defenseurdesdroits.fr ; Twitter : @Defenseurdroits
· Mme Elisabeth Laurin, Représentante permanente de la République française auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, Fax : +41 22 758 91 37 ; E-mail : mission.france@ties.itu.int ; Twitter : @FranceONUGeneve
· M. Pierre Sellal, Représentant permanent de la République française auprès de l’Union européenne à Bruxelles, Fax : +32 22 30 99 50 ; E-mail : courrier.bruxelles-dfra@diplomatie.gouv.fr ; Twitter : @RPFranceUE
Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques de la France dans vos pays respectifs.